Le Haras de Lamballe est, avec le Haras d'Hennebont, l'un des plus grands haras de Bretagne. Il se situe dans le département des Côtes d'Armor. Les 2/3 du haras sont constitués de chevaux de trait bretons, étalons et poulinières.
I - Le concours d'achat des étalons
Tôt le mercredi, avant même que le jour se lève sur l'allée centrale du Haras, fouétée par les grains, les hommes sont à pied d'oeuvre. La veille au soir, ils s'étaient fait une litière de paille dans un box inoccupé et s'étaient allongés dans un duvet pour une courte nuit, troublée par les coups de sabots des étalons nerveux. Ils s'affairent maintenant à les nourrir et refaire la litière avant de passer à la toilette, de brosser soigneusement la robe, puis de mouiller queues et crinière pour mieux les tresser avec des lanières de raphia.
Le programme du "concours d'achat" annuel des étalons bretons était réglé comme du papier à musique, depuis l'arrivée jusqu'au vin d'honneur le jeudi en fin de matinée. Entre temps, les 68 étalons inscrits allaient être présentés au jury et aux acheteurs selon les règles de l'art.
De temps à autre, les jurons fusent et une main claque bruyamment sur les flancs d'une bête agitée, puis des hennissements en cascade saluent le passage d'un cheval fin prêt pour le concours.
II - La naissance d'une race
Au milieu de XIXè siècle, quand le Haras s'installe la consigne est d'alléger la race bretonne, issue de l'ancien bidet et du sommier. C'est à cette fin que Lamballe reçoit d'Angleterre, en 1844, Sir Henry Dimsdale, un demi-sang norfolk, excellent trotteur. Il ne séjournera qu'un an dans les Côtes d'Armor, suffisamment pour tenir brillamment ses promesses et ébaucher une race nouvelle : le norfolk breton, qui deviendra le postier.
III - Au rythme du Haras
Une bonne trentaine d'années plus tard, le trait breton ne doit sa survie qu'à ses qualités exceptionnelles d'adaptation, mises en valeur par une poignée d'étaloniers, et à la volonté des Haras nationaux de sauver une race qu'ils ont largement contribué à façonner.
L'adaptation est sans doute plus aisée pour les pensionnaires du Haras de Lamballe, élevés pour la plupart dans le Léon, le pays de Rennes ou celui de Vitré. Pourtant, eux aussi changent d'univers. Dans les écuries bordées de massifs de roses, de haies et de pelouses soigneusement taillées, ils découvrent les méthodes, les traditions, l'ambiance d'une administration créée par Colbert en 1665, avant d'être restructurée par Napoléon en 1806.
De temps en temps pourtant le rite des repas, des soins et des exercices bi-quotidiens est bousculé : les agents quittent leurs vêtements de travail pour l'uniforme : les chevaux sont toilettés, tressés et harnachés et attelés pour la parade dans les rues de Lamballe. Mais c'est aux derniers jours de l'hiver que tout à coup la vie s'emballe au Haras : les mois qui précèdent ne sont en fait qu'une patiente préparation à la saison de monte, pendant laquelle les étalons vont remplir leur mission de reproducteur.
IV - L'insémination artificielle
Cette monte naturelle ne se pratique plus aujourd'hui que dans 40 % des cas. Elle cède progressivement la place, depuis plus de dix ans, à l'insémination artificielle. Finies les migration printanières pour la majorité des pensionnaires : c'est à distance qu'ils se reproduisent de plus en plus souvent.
Chaque matin, à Lamballe et Saint Pol de Léon, où une vingtaine de chevaux du Haras sont basés pendant la période de reproduction, on recueille la semence de plusieurs d'entre eux. Elle est aussitôt acheminée, par camion, à une température de 4°C, vers les stations équipées pour cette forme d'insémination. L'étalon souffleur, par contre -Lamballe en possède une douzaine- est toujours du voyage, car la technique de l'échographie ou celle de la palpation des ovaires par un vétérinaire sont généralement réservé aux chevaux de grande valeur marchande. L'échographie est par contre généralisée en Bretagne pour vérifier si les juments de trait sont bien fécondées.
V - Une maison du cheval
Avec la complicité des ingénieurs, le nouveau directeur souhaite faire du Haras le pivot d'une politique de promotion du cheval en Bretagne nord. A peine arrivé dans les Côtes-d'Armor, il a évoqué la création d'une Maison du cheval. Il veut organiser des concours, faire des activités variées...
Les élus de la ville et du district espèrent que Lamballe rimera toujours avec Cheval.
Pourtant, si pendant près d'un siècle et demi, la question de la survie du Haras était sans objet, elle franchit aujourd'hui la grille du grand parc ouvert au public.
Les photos sont de : Michel Thersiquel
Quelques photos que j'ai prises lors de ma visite au haras :
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